Le vendredi 25 avril 2025, à Washington D.C., le gouvernement haïtien et la Banque mondiale ont officialisé la signature d’un accord de financement d’un montant de 50 millions de dollars destiné à la deuxième phase du projet « Territoires Productifs Résilients ». Cet appui financier s’inscrit dans la stratégie nationale de lutte contre l’insécurité alimentaire et de promotion d’une agriculture durable, dans un contexte alarmant où près de 50 % de la population haïtienne souffre d’insuffisance alimentaire.
Une approche multisectorielle face à une crise alimentaire multidimensionnelle
Depuis plusieurs années, Haïti fait face à une détérioration rapide de ses conditions de vie rurales, sous l’effet conjugué de l’inflation galopante, des effets dévastateurs du changement climatique, de la dégradation accélérée des sols agricoles et de l’insécurité grandissante. L’aggravation de la pauvreté a contraint de nombreux ménages à réduire drastiquement la quantité et la qualité de leurs repas quotidiens.
Conscient de cette situation dramatique, le projet financé entend proposer une réponse globale, en articulant interventions agricoles, protection de l’environnement et gestion durable des ressources hydriques. « Ce financement vise à renforcer durablement la résilience des territoires ruraux, en soutenant l’activité des petits producteurs agricoles et en restaurant les écosystèmes fortement dégradés », a précisé un haut fonctionnaire du Ministère de l’Économie et des Finances lors de la cérémonie de signature.
Un plan d’action ambitieux et structuré
Le programme prévoit plusieurs volets d’intervention stratégiques, parmi lesquels :
- La promotion de techniques agricoles durables : accompagnement à la transition vers des pratiques respectueuses de l’environnement, introduction de semences améliorées, diversification des cultures et usage raisonné des intrants.
- La réhabilitation et la protection des bassins versants : construction d’ouvrages anti-érosion, reboisement, conservation des sols et gestion intégrée des paysages.
- L’amélioration des infrastructures d’irrigation : modernisation des réseaux hydrauliques pour une meilleure distribution de l’eau, avec un accent particulier sur les petites exploitations.
- Le soutien aux filières agricoles locales : appui à la transformation des produits, structuration des circuits de commercialisation, accès facilité aux marchés nationaux et régionaux.
La coordination du projet sera assurée par le Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR) en partenariat avec le Ministère de l’Environnement, autour d’un plan directeur de paysages productifs résilients, établi pour structurer les interventions à l’échelle territoriale. Le projet prévoit également des investissements dans la recherche agronomique, l’innovation technologique et la formation des jeunes ruraux.
Un nouvel élan pour les campagnes, mais des risques persistants
Dans les milieux ruraux, ce financement est perçu comme un signal positif qui pourrait offrir une bouffée d’oxygène à des milliers de producteurs marginalisés. S’il est bien exécuté, le projet pourrait stimuler la création d’emplois, réduire l’exode rural et renforcer la sécurité alimentaire sur le long terme.
Cependant, les défis sont majeurs. Haïti porte encore les cicatrices de plusieurs décennies de projets de développement avortés, d’inefficacités administratives et de pratiques de mauvaise gouvernance. Le spectre du détournement des fonds, de la mauvaise allocation des ressources et du manque de suivi rigoureux plane sur cette nouvelle initiative.
La réussite de cette deuxième phase dépendra donc de la capacité des autorités haïtiennes, en collaboration avec la Banque mondiale et les organisations locales, à assurer une gestion transparente, efficace et participative des ressources allouées. La mise en place d’un mécanisme de suivi-évaluation indépendant, ainsi qu’une implication accrue des bénéficiaires directs, seront indispensables pour éviter les erreurs du passé.
À travers ce financement, c’est une opportunité historique qui s’ouvre pour revitaliser l’agriculture haïtienne, redonner espoir aux communautés rurales et poser les jalons d’une croissance inclusive et durable. Reste à voir si cette fois, les promesses se traduiront réellement en actions concrètes.