L’affaire révélée par l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) est d’une gravité exceptionnelle : elle entache l’un des symboles les plus sacrés de l’État haïtien , l’Office de la Protection du Citoyen (OPC). Que l’institution censée défendre les droits du peuple se transforme en machine à détourner ses deniers publics, voilà une trahison qui appelle à l’indignation, mais surtout à des sanctions exemplaires.
Le rapport accablant de l’ULCC dresse un tableau édifiant : voyages fictifs, per diem indûment encaissés, passation illégale de marchés, comptes personnels engraissés à coups de millions de gourdes. Et au sommet de cette pyramide du cynisme, Renan Hédouville, ancien Protecteur du Citoyen, qui aurait perçu à lui seul plus de 2 millions de gourdes pour des missions jamais réalisées.
Ce n’est pas seulement la loi qui a été bafouée, mais aussi la confiance d’un peuple qui n’a que trop souffert de l’impunité et de la duplicité de ses élites. Comment un haut fonctionnaire censé défendre les plus vulnérables a-t-il pu instrumentaliser son poste pour satisfaire des intérêts personnels et familiaux ? Comment des cérémonies religieuses à l’étranger ont-elles pu devenir des prétextes pour dilapider des fonds publics dans un pays où l’éducation, la santé et la sécurité sont en lambeaux ?
Il ne suffit plus de dénoncer. Il ne suffit plus de publier des rapports. Le peuple haïtien mérite que justice soit rendue. Que ces dossiers ne finissent pas dans les tiroirs de l’oubli ou les labyrinthes de la complicité institutionnelle. L’heure est à l’action : poursuites judiciaires, restitution des fonds, interdictions de fonction publique, sanctions internationales s’il le faut.
La corruption, lorsqu’elle atteint le sommet d’une institution vouée à la protection des citoyens, devient un poison pour la démocratie. Si Renan Hédouville et ses complices ne sont pas jugés, ce ne sera pas seulement un scandale de plus. Ce sera un précédent funeste. Une nouvelle preuve que, dans notre pays, même la morale peut être détournée.
C’est pourquoi, aujourd’hui, il ne s’agit pas seulement de justice, mais de salut public. Haïti ne peut pas se permettre que ses défenseurs deviennent ses bourreaux.